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Partage

nom masculin

(ancien français partir, partager, du latin partire)

Fait de partager quelque chose avec quelqu'un.

Hysteria

Que serait le partage poussé à l'extrême ? Hystériser l'autre.

 

Si hystériser c'est faire naître dans le corps de l'autre un foyer ardent de libido, alors je pense ma création dans le but d'hystériser les spectateurs. Evelyne Grossman touche avec son ouvrage L'Éloge de l'hypersensible qui est le centre de ma recherche sur la passion. Elle décrit sensiblement la quête de Deleuze et d'Artaud d'atteindre leurs lecteurs ou spectateurs au travers de sensations fortes : cette intensité de vie qui se trouve dans la cruauté selon Artaud ou dans l'affect selon Deleuze. 

Est-ce trop demandé comme effet d'affecter les spectateurs ? Il me semble que c'est la raison même pour laquelle je désire faire de la mise en scène.

Reste le risque de ne pas se faire comprendre, de ne pas affecter du tout, de ne pas trouver le langage nécessaire pour toucher et partager cette intensité de vie dont Deleuze parle.

Artaud était plus ou moins incompris à son époque, son œuvre paraissait souvent trop énigmatique, trop folle, trop extrême. Pourtant, il a agit sous la contrainte d'un véritable besoin d'exprimer et de partager ses affects. C'est donc une démarche profondément honnête poussée par une nécessité d'expression. Je crois que l'artiste se met à la recherche de ces milles chemins possibles pour atteindre celui qui reçoit l’œuvre.

Je pourrais dire que cette création serait un début de recherche de ces chemins possibles. Choisir comme thème la passion représente pour moi une prise de position semblable aux quêtes d'Artaud et de Deleuze évoquées par Evelyne Grossman. Il s'agit pour moi d'assumer l'intensité d'un vulnérable commun, c'est-à-dire percevoir avec force nos états d'êtres émotifs.

A la fois cette recherche demande une justesse d'analyse et une perception de soi-même, à la fois il me parait primordial de garder l'ouverture face à l'autre. Rendre avec justesse ce qui nous traverse n'est possible que si celui qui est adressé se rend disponible pour recevoir, pour s'identifier. Ce moment de rencontre entre deux langages est souvent lié à un état de tension ou d'excitation. La question qui nous rends un peu fébrile : est-ce que l'autre va comprendre ? Dans cette sensibilité et fragilité repose pour moi un grand intérêt du théâtre. Deux parties choisissent de s'exposer et de se laisser affecter.  Quel cadeau si cela devient possible.

Eloge de l'hypersensible de Evelyne Grossman, Minuit, 2017.

page 14

Hystériser, c'est faire naître dans le corps de l'autre un foyer ardent de libido

p.15

Gilles Deleuze et Antonin Artaud cherchent :

"explorent le même paradoxe : comment atteindre l'autre (le lecteur, le spectateur), comment l'affecter, comment projeter en lui ces sensations, cette jouissance, que je peine à ressentir ? Cruauté chez Artaud, affect comme logique de forces, intensité de vie chez Deleuze."

p.16

"scène théâtrale - scène hystérique"

De quoi il s'agit chez Deleuze, Barthes,  Bourgeois, Duras ?

"D'élargir le champs de nos perceptions et affects, d'inventer un espace transindividuel (artiste et spectateur, auteur et lecteur) qui nous ouvre à un autre corps de sensation, ni le mien ni un autre, à éprouver, à vivre à penser - un corps où nos subjectivités, un temps, se défont et se recomposent, différentes."

p. 25

"Trop fragile pour l’héroïsme ou trop lucide, l'hypersensible essaierait tout juste de nommer l'extrême intensité d'un vulnérable commun.

Mille plateaux de Gilles Deleuze et Felix Guattari

"Car l'affect n'est pas un sentiment personnel, ce n'est pas non plus un caractère, c'est l'effectuation d'une puissance de meute qui soulève et fait vaciller le moi"

Citations

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